
Visuel : extrait de l'ouvrage Le champignon de la fin du monde, Anna Lowenhaupt Tsing, édition La découverte, 2017, p.98
02.05 — 20.06.2025
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Vernissage samedi 3 mai 2025 à 18h
Mushroom buyer
Le 33, rue Saint-Jacques, 13006 Marseille
Mathilde Nicol
curation : Nadiejda Hachami
Dans la salle des fêtes, on rencontre une société mycologique venue pour observer, comprendre et identifier avec passion. Sous le châtaignier, il est de coutume de ne pas divulguer les « adresses à champignons » car certain·e·s arrondissent leur fin de mois grâce à ces cueillettes. Plus loin, en Oregon, au Canada ou en Roumanie, des micro-sociétés se développent en marge et font de la cueillette sauvage leur bâton d’émancipation. Ici, on voit se dessiner une analogie entre le·la champignonneur·euse et l’artiste. Tou·te·s deux sont dans une recherche appliquée et engagée de la cueillette idéale qu’iels tenteront ensuite d’échanger contre une juste somme. Mushroom Buyer, c’est donc le bilan d’une cueillette, l’exposition des trouvailles de plusieurs pérégrinations pour finir par un geste simple : la vente de champignons rares.
Depuis la Montagne Noire, au sud du Massif Central, Mathilde Nicol développe une pratique sculpturale nourrie par l’observation attentive du paysage. Dans l’une de ses précédentes sculptures : H.A.E (Habitat pour d’Autres Espèces), elle interrogeait les conséquences de la sylviculture sur la biodiversité forestière, en particulier les communautés mycète et végétale. Avec Mushroom Buyer, l’artiste focalise sa recherche sur la compréhension des organismes fongiques à travers l’approche scientifique de la mycologie — la discipline qui étudie les champignons et les lichens. D’autre part, elle emprunte à l’ethnographie des méthodes de terrain. Cela l’amène à explorer des formes d’économies parallèles liées à la cueillette sauvage de champignons.
L’exposition entre en résonance avec les écrits d’Anna Tsing, notamment Le champignon de la fin du monde, dans lequel l’autrice examine la manière dont les cueilleur·euse·s de matsutake intègrent — tout en restant en marge — les circuits commerciaux de la gastronomie de luxe. Mathilde Nicol établit un parallèle entre ces réseaux de cueillette et ceux du monde de l’art, tous deux régis par des dynamiques de précarité et de valeur symbolique. Les sculptures présentées ici sont mises en vente comme on le ferait en lisière de forêt. L’artiste déjoue les codes du marché de l’art en attribuant à ses céramiques un prix au kilo. Ainsi commercialisées, elles renvoient aux denrées rares récoltées par ces glaneur·euse·s saisonnier·ère·s.
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Texte et curation : Nadiejda Hachami
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L'exposition Mushroom Buyer est le fruit de recherches sur les circuits de champignonneur.euses à échelle de différents territoires. Des observations que j’accumule naissent des champignons en céramique. Ceux-ci ne sont jamais vraisemblables, mais leurs émaux proviennent de récoltes de végétaux et minéraux qui jonchent mes balades en forêts. Ils sont aussi le résultats de multiples expérimentations à bases d'éléments géologiques provenant du commerce. Les cueilleur.euses de champignons, dont parle Anna Tsing dans Le champignon de la fin du monde, gagnent leur liberté en commerçant avec des intermédiaires du marché de la gastronomie de luxe. Les sculptures en céramique établissent un parallèle entre les circuits économiques dans lesquels évoluent les cueilleur.euses de champignons et les artistes, tous.tes deux étant attaché.e.s à un marché à haute valeur financière.
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Texte : Mathilde Nicol
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Programmation du 17ème Printemps de l'Art Contemporain -> parcours Préfecture ​​



